France

Les îles se mobilisent pour mieux gérer leurs déchets

Déjà compliquée pour les villes, la gestion des déchets l’est encore plus pour les îles. Elles sont en effet confrontées à leur accumulation et aux difficultés pour les traiter, logistiques notamment. C’est pourquoi l’ONG Smilo (Small Islands Organisation) les accompagne dans l’adoption de pratiques durables, adaptées à leurs problématiques, et faciles à déployer.

Porquerolles, Tavolara, Zlarin en Méditerranée ; Brownsea dans la Manche ; Santa Luzia dans l’océan Atlantique… Derrière les noms de ces territoires, des points communs : être des îles, confrontées à des problématiques similaires, notamment pour gérer les déchets. Cela englobe aussi bien l’accumulation de différentes variétés de détritus (ménagers, verts, résidus de travaux, etc.) que les besoins faits en pleine nature par les touristes et vacanciers, ou que les eaux grises et usées qui ne transitent pas par une station d’épuration… Un condensé de difficultés que leurs gestionnaires cherchent à résoudre.

Pour y parvenir, Smilo se propose de les accompagner. Cet ONG a été créée en 2016 sur initiative de la délégation Europe et internationale du Conservatoire du littoral autour d’un objectif qui n’a pas varié : mettre en place des solutions simples, adaptées à chaque territoire.

Bonnes pratiques en France…

À titre d’exemple, sur l’île française du Levant, située face aux côtes varoises, l’accent a été mis sur les déchets verts. La réflexion s’est orientée vers un traitement sur place plutôt qu’un envoi sur le continent. Smilo a donc aidé à l’installation d’un broyeur à végétaux, destiné aussi bien aux services d’entretien qu’aux particuliers. En 18 mois d’utilisation, cet outil a permis d’éviter des émissions équivalant à 18 000 kilomètres parcourus en voiture. Et en plus de supprimer le coût écologique – et même économique – du transport, cette solution offre aux habitants du compost pour leurs espaces verts.

Plus à l’est, sur l’île de Saint-Honorat, au large de la baie de Cannes (Alpes-Maritimes), ce sont les déchets des touristes qui posaient problème. Car les poubelles avaient tendance à déborder, favorisant notamment la prolifération des rats. Sans compter que l’acheminement des déchets vers le continent pour les traiter se révélait, là aussi, coûteux et polluant. Décision a alors été prise de les retirer. Désormais, les touristes repartent avec leurs restes et détritus dans leur sac. « Cette mesure a permis de réduire le volume de déchets de 30% », indique Maxime Prodromides, le président de Smilo.

…et ailleurs dans le monde

Les exemples sont loin de se cantonner aux eaux françaises. Aujourd’hui Smilo compte en effet une soixantaine d’îles dans son réseau, réparties un peu partout sur le globe. Ainsi, sur l’île de Santa Luzia, dans l’archipel du Cap-Vert (nord-ouest de l’Afrique), un système de traitement des déchets organiques a été installé. Outre une diminution de la pollution, en particulier celle liée aux matières fécales, il fournit du biogaz aux pêcheurs.

Autre illustration des possibles avec l’archipel tunisien des Kerkennah (Tunisie). Ici, l’ONG a réussi à mobiliser l’ensemble des acteurs concernés pour expérimenter une solution de collecte et de valorisation des nasses de pêche qui généraient jusqu’alors 600 tonnes de plastiques chaque année. « Notre travail a contribué à faire entrer les nasses dans le système de consigne de plastique déjà instauré en Tunisie », explique Sylvain Petit, le secrétaire exécutif de Smilo. Simple et efficace.

Au-delà des déchets

Si l’idée originelle de Smilo était de dupliquer les idées d’île en île, l’ONG a désormais changé de stratégie. Car tous les territoires insulaires ne rencontrent pas exactement les mêmes problématiques. Et les priorités de l’un ne sont pas forcément celles des autres. C’est pourquoi, l’équipe mise plutôt sur des solutions au cas pas cas, faciles à instaurer. Et surtout concertées et combinées avec les différents acteurs intervenant sur place.

Smilo n’intervient d’ailleurs pas seulement sur la gestion de leurs déchets. « C’est souvent l’un des premiers problèmes qui apparaît, en raison du tourisme et des difficultés de se faire entendre par les politiques », observe Maxime Prodromides. « On les accompagne également sur les problématiques de l’eau et l’assainissement, de l’énergie, de la biodiversité, des paysages et patrimoines insulaires », détaille-t-il.

En contrepartie des investissements déployés, et quand les objectifs de chacune des thématiques en jeu sont remplis, les îles se voient décerner le label « île durable ». Pour cela, chaque geste compte, aussi minime soit-il. « Il y a toujours de petites choses à mettre en place, même face à des situations complexes. On part parfois de très loin sur certains sujets, mais à force de débloquer des solutions coordonnées, il est possible de renverser la vapeur », estime Maxime Prodromides. Smilo n’entend pas s’arrêter en si bon chemin. Son objectif pour l’avenir : étendre davantage encore son réseau. Et avec plus de 460 000 recensées à ce jour à travers le monde, il y a encore de quoi faire.

Sur l’île de Saint-Honorat, désormais, les touristes repartent avec leurs restes et détritus dans leur sac

Photos de Une : Les lagunes sur l’île de Porquerolles sont essentielles à la réutilisation des eaux usées traitées © DR