De nouvelles énergies, notamment renouvelables sont testées chaque jour. En partenariat avec Marcelle, 22-Med propose cette semaine trois articles sur cette thématique. Avec pour commencer, le chauffage au miscanthus.
On l’appelle aussi l’herbe à éléphant, le roseau de Chine ou Eulalie. Originaire d’Afrique et d’Asie du Sud, le miscanthus est connu pour apporter au sol de nombreux micro-nutriments lors de sa décomposition. En 2023, sa culture représente environ 11 000 hectares en France. Biocombustibles, litière, paillage horticole, biomatériaux, il s’intègre parfaitement dans la bioéconomie. Quatorze communes françaises l'utilisent déjà pour chauffer des bâtiments communaux, des habitations ou encore des châteaux. C'est le cas de Bernwiller, en Alsace. Ici, on l’utilise depuis 2011 pour purifier les sols… et se chauffer !
L’histoire a commencé en 2008, avec une détérioration de la qualité de l’eau : le taux de nitrate est passé de 20 milligrammes par litre à 40 en dix ans. Le miscanthus se présente alors comme une solution facile (nul besoin d’engrais ou pesticides) et efficace pour assainir l’eau des 1200 habitants de la commune.
Des terrains communaux cultivés
" Notre eau commençait à être fortement polluée par le nitrate et nous cherchions une solution pour l’assainir ", se souvient Patrick Baur, maire de Bernwiller. "Le président de notre syndicat d’eau utilisait déjà le miscanthus au niveau professionnel, pour faire les paillages. Il connaissait donc la plante et a eu l’idée de la faire pousser sur les terrains alentour du captage d’eau. Une étude a été faite pour s’assurer de son efficacité et nous en avons planté 27 hectares."
Les élus ont eu la bonne idée de pousser la réflexion : était-il possible d’utiliser cette plante qui repousse chaque année sans trop d’entretien à d’autres fins que le paillage et de l’assainissement de l’eau ? Renseignements pris, cela peut marcher pour le chauffage. Après un essai concluant dans l’une des deux chaufferies communales, le village se lance ! Depuis, une chaufferie tourne à 100% au miscanthus et l’autre à environ 50%, selon la récolte.
Patrick Baur précise : " Actuellement, nous avons 27 hectares de miscanthus plantés dans notre commune (soit une moyenne de 320 tonnes) et souhaitons ajouter une dizaine d’hectares. C’est l’un de nos projets de 2024 : que des propriétaires terriens nous rejoignent pour en planter. Avec l’objectif de couvrir les besoins de nos deux chaufferies, mais surtout de maintenir un sol avec le moins de polluants possible. Parce que le niveau de nitrate est bien redescendu grâce au miscanthus : nous sommes à nouveau à environ 20 mg/l. Le grand avantage est qu’il n’y a rien à ajouter à cette plante qui repousse seule. Les feuilles tombent à la mi-saison et nourrissent le sol. "
Circuit court
Non seulement les plantations se situent sur les terrains communaux, mais il suffit de planter le miscanthus une seule fois pour des années de récolte. Cependant, il faut indemniser les différents agriculteurs-récoltants, que la commune rémunère à hauteur de 110 euros la tonne. Ensuite, la récolte est stockée dans deux hangars de 2000 m3 chacun. Pendant la période hivernale, un agriculteur du village s’occupe du transport vers les différentes chaufferies.
La chaufferie de Bernwiller, celle qui tourne à 100% au miscanthus, dessert tous les bâtiments communaux : les écoles, l’ancienne mairie, la salle communale, des logements communaux, l’église et une quinzaine d’habitations privées qui sont branchées sur le réseau de la chaufferie.

L'aspect financier a aussi été essentiel dans la mise en place du projet. "La difficulté, c’est quand vous créez le tout : planter le miscanthus, installer la chaufferie, aménager le réseau… Ça a un coût beaucoup plus important qu’un système normal, souligne Patrick Baur. Mais nous avons pu répartir les dépenses en faisant la chaufferie en 2007, en plantant en 2008 et en 2011, en réalisant des investissements par petits paquets. Si quelqu’un doit investir dans un tel montage actuellement, ce n'est pas anodin, mais c’est vraiment un projet d’avenir",

Photo de Une : Un champ de miscanthus, en Alsace. ©Mairie de Bernwiller
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