Green Cross International est une Organisation non gouvernementale (ONG) fondée à la suite du Sommet de la Terre de Rio de Janeiro au Brésil en 1992. Cette conférence des Nations Unies qui avait réuni 120 chefs d'État et de gouvernements et 189 pays est considérée comme le point de départ de la prise de conscience planétaire de l’urgence climatique et écologique. Depuis, 32 ans ont passé et pour le directeur exécutif de Green Cross International, Nicolas Imbert, l’urgence climatique et écologique est toujours là. Rester passif n’est plus une option.
C’est maintenant que nous devons agir pour sortir de l’impasse et transformer notre économie et nos vies pour le meilleur. Comment ? En reprenant en main notre alimentation, en préservant l’eau, l’océan et l’énergie, en ménageant les territoires. Mais avant d’agir (à venir #2), il faut comprendre !
# 1 Analyser la situation
Comprendre l’espérance de vie
Les efforts conjugués de la médecine et du développement humain de nos sociétés ont permis de franchir, du XIXe au XXIe siècle, des progrès en qualité de vie que nous n'aurions probablement pas osé espérer il y a cent cinquante ans. Aujourd'hui, l'espérance de vie en Europe stagne ou recule légèrement. Plus précisément, l'espérance de vie en bonne santé recule sur l'ensemble de la population, et ce d'autant plus rapidement que le reste à vivre est important.
En d'autres termes, plus vous êtes jeunes, moins vous aurez de chance de vivre en bonne santé aussi longtemps que vos parents. Chacune et chacun peut maintenant percevoir les effets du dérèglement climatique dans son quotidien avec des alternances de sécheresses, d'inondations et d'intempéries, toujours plus fréquentes et plus graves dans leurs effets. Partout sur la planète, les pénuries ou les difficultés structurelles de préservation des ressources vitales font désormais partie du quotidien, qu'il s'agisse d'alimentation, d'eau ou de biodiversité, car les limites planétaires sont atteintes ou dépassées.
Comprendre la main mise sur la planète
La génération de l’après-guerre en Occident est arrivée massivement au pouvoir politique, économique et médiatique lors des années 1980 et 1990. Ses représentants ont choisi de s’y maintenir durablement par ce qui se matérialise désormais comme un triple hold-up sur la planète et les générations futures.
Hold-up géographique, tout d’abord. En maintenant le reste du monde sous domination économique et idéologique, ces décideurs ont bâti, par leurs actions et leur mode de vie, un réseau d’esclavage moderne au service de leurs intérêts. Sans que ce soit de manière planifiée ni coordonnée, une soif de voyages et de découvertes appuyée par un esprit de consommation de masse a transformé chaque acteur occidental actuel en une courroie de transmission de ce hold-up géographique.
Hold-up diplomatique, sous couvert de soutenir la croissance des pays en voie de développement dans un schéma de pensée de type colonial, les organismes dits d’aide au développement (FMI, Banque mondiale, aides multilatérales) menacent leurs agricultures et leur subsistance, rendent leur industrie vulnérable et leur main-d’œuvre précaire, pour le plus grand bénéfice des banques occidentales et au prix d’une corruption élevée. Cela revient, pour les Occidentaux, à vivre à crédit des États plus pauvres et de leurs propres enfants […]
Comprendre nos vulnérabilités
Nous percevons dans notre quotidien post Covid-19, et alors que le dérèglement climatique est chaque jour plus perceptible dans le quotidien des Français, à quel point la métamorphose rapide de nos sociétés est nécessaire. Et nous comprenons que nous devons la financer par les richesses maintenant disponibles pour éviter que la continuation de ce hold-up à crédit la rende complètement impossible à effectuer.
Pourtant, les historiens, sociologues ou géographes montreront probablement, comme les scénaristes ont commencé à le faire, à quel point le XXe siècle aura été celui des idéologies dangereuses, du mythe de la capacité à tout industrialiser et d’une absence d’intégration des limites. Le concept et la réalisation d’une centrale nucléaire en sont une parfaite illustration. Sur la découverte d’une propriété atomique utile à l’humanité est venue se greffer l’addiction idéologique aux phénomènes de réactions en chaîne qui permettent la réalisation de bombes et de dispositifs énergétiques centralisés, sans en anticiper les conséquences. Ainsi, pour justifier la course à la magnificence supposée de l’armement nucléaire, un petit nombre de pays (moins de 8 sur 197 désormais) a décidé d’utiliser cette énergie issue de l’atome pour faire, au prix d’investissements démesurés, de l’eau bouillante faisant tourner une turbine pour produire de l’électricité. Le tout, à partir d’un minerai dont on ne maîtrise ni géographiquement, ni politiquement, ni techniquement la ressource, ni le cycle de vie, ni les externalités du processus d’extraction. Tout cela au nom de l’autonomie énergétique, sans aucune corde de rappel à la réalité.
Cette volonté d’agir pour des raisons militaires, et l’absence de débat public associé ont permis les investissements massifs et la mobilisation inconsidérée de moyens de recherche publique. C’est toute une filière qui s’est auto-convaincue d’investir dans des moyens de transport et de distribution démesurés, obstacles à tout déploiement d’énergies renouvelables ou à toute politique d’efficacité énergétique […]
Comprendre la santé environnementale
La santé environnementale et la prévention sont deux sujets particulièrement délaissés en France. L'Europe fixe pourtant un cadre structurant pour ces politiques publiques, en particulier avec le concept One health, qui développe une politique à la fois ambitieuse et intégrée, cohérente entre les enjeux environnementaux, alimentaires, de santé publique et de médecine préventive, de médecine curative, de prise en compte de la dépendance, du handicap et du grand âge. Dans un récent ouvrage, Le juste soin, le Dr François-Georges Carissimo démontre à quel point ajuster l'offre de soins par rapport au besoin de chacun est à la fois plus efficace économiquement, développeur de vivre ensemble, et respectueux de l'humain.
En effet, les alertes récentes sont nombreuses, liées à la prolifération des perturbateurs endocriniens dans notre alimentation et notre quotidien. L'agriculture française reste engluée dans une dépendance au glyphosate, à contresens de l'histoire, tandis que se répandent l'obésité et le surpoids, nouveaux marqueurs sociaux. Les pollutions de l'eau et des sols devraient pourtant nous inciter à ne pas considérer les réglementations environnementales comme optionnelles. Mais plutôt à inscrire davantage notre pays dans la trajectoire européenne de protection du consommateur et de course en tête dans la lutte contre l'urgence climatique. Ce que I'Accord de Paris issu de la 21e conférence des parties sur le changement climatique (COP 21) nous laissait espérer en 2015. […]

Extraits du livre « repanser la planète ». Son auteur Nicolas Imbert est un ingénieur français, directeur exécutif de l’ONG Green Cross. Il intervient sur la structuration des propositions de la société civile sur le climat, la santé environnementale, la résilience territoriale et la prévention des conflits environnementaux, en France et à l’international.

Illustration de Une : À partir de cette conversation, l’IA a généré un flot d’illustration. Stefan Muntaner l’a nourri avec les données éditoriales et a guidé la dimension esthétique. Chaque illustration devient ainsi une œuvre d’art unique à travers un NFT.