Grèce

Syros : l’île de l’unité religieuse

Au cœur de la mer Égée, l’île de Syros est un symbole d’unité religieuse. Ici, deux dogmes ne font pas que cohabiter : ils avancent ensemble avec harmonie. Catholiques et orthodoxes y partagent leur quotidien, leurs traditions, mais aussi leurs fêtes religieuses tout au long de l’année. De Noël à Pâques en passant par les fêtes des saints locaux, les cloches résonnent en chœur, les fidèles des deux églises se retrouvent dans les rues et dans les églises, sans distinction religieuse.

Pour Nikos Solaris, professeur de danses traditionnelles depuis 53 ans, ce sont les mariages mixtes qui ont joué un rôle clé dans l’acceptation de l’autre. Ces unions, au-delà de leur signification personnelle, sont aussi des exemples concrets de la coexistence entre les deux traditions.

Des mariages d'unité

« Il y a 50 ans, il y avait quelques problèmes sur l'île. Par exemple, un catholique n'allait pas dans un commerce orthodoxe. Cela a disparu maintenant, cela a été surmonté et cela a été facilité par les mariages mixtes. Désormais, le catholicisme et l'orthodoxie sont harmonieusement liés à Syros, comme s'il n'y avait aucune différence. »

Né et élevé à Syros, Nikos Solaris est catholique tandis que sa femme est orthodoxe. Il explique qu’il est rare de trouver un couple où les deux membres appartiennent au même culte. « C'est très beau de voir des orthodoxes à des fêtes catholiques et vice versa. De plus, lors de la fête du saint patron des catholiques à Áno Syros (situé à l'est de l'île, c'est le siège historique médiéval de Syros et le centre administratif de la municipalité unifiée de Syros), le représentant de l'Église orthodoxe est souvent présent, et parfois même l'archevêque. Il y a une très bonne coexistence entre catholiques et orthodoxes, et chacun respecte la foi de l'autre ».

Grandir dans le respect et l’acceptation

Sur cette île de 20 000 habitants, dont 40 % sont catholiques, le vivre ensemble s'apprend dès le plus jeune âge. Les enfants grandissent en sachant que la diversité religieuse fait partie de leur quotidien.

Nikos Roussos, professeur de musique dans le primaire depuis trente ans et membre fondateur de l’Orchestre des Cyclades, observe cela depuis des décennies. Les enfants comprennent dès leur plus jeune âge qu'il n'y a pas que leur religion qui existe. « On voit des élèves de familles catholiques et orthodoxes jouer ensemble, aller aux fêtes de l'autre et participer à des événements, indépendamment du dogme. La diversité fait partie de leur quotidien et ils l'abordent avec naturel », note-t-il. « Le jour de la bénédiction dans les écoles, des représentants des deux églises sont présents », ajoute-t-il.

Une fête d'unité

Ce respect mutuel ne se limite pas à la vie quotidienne ou aux cours d'école. Chaque année, à l'approche du moment culminant du christianisme, Pâques, cette unité se manifeste de manière unique. Depuis quelques décennies, orthodoxes et catholiques y célèbrent Pâques ensemble, malgré les différences de calendrier religieux.

« Par décision de la Sainte Synode de la Hiérarchie Catholique de Grèce, orthodoxes et catholiques célèbrent ensemble Pâques à Syros, prouvant que ce qui nous unit est plus important que ce qui nous divise », souligne Nikos Roussos.

Nikos Solaris insiste lui aussi sur l’importance de cette célébration commune. Au cours de la Semaine Sainte, les couples mixtes visitent à la fois l'Église orthodoxe et l'Église catholique, participant aux cérémonies des deux confessions.

« Le jour commun de célébration de Pâques nous a encore plus unis. Par exemple, le Jeudi Saint, l'homme catholique avec la femme orthodoxe ira à l'église orthodoxe, tandis que le lendemain, ils se retrouveront ensemble à l'Église catholique. Ce changement est quelque chose de tout à fait normal à Syros. Le respect mutuel et l'acceptation de l’autre sont le fondement de notre communauté. Chacun respecte les croyances de l'autre et cette harmonie se reflète dans chaque fête. »

Nikos Roussos exprime le souhait que l'exemple de Syros devienne une source d'inspiration pour d'autres sociétés. « J'aimerais que ce que nous vivons ici depuis de nombreuses années devienne une réalité pour d’autres ». C’est peut-être la leçon d’une petite île grecque au monde.

Depuis le port d'Ermoupolis, on aperçoit deux églises emblématiques de Syros : à gauche, la cathédrale catholique Saint-Georges et à droite, l'église orthodoxe de la Résurrection du Christ © Kelly Fanarioti

Photo de Une : Le clocher de Saint-Dimitrios, une église orthodoxe de Syros © crédits Kelly Fanarioti